jeudi 3 avril 2014

Japon 2014 - Kōchi (高知市)

Jour 10

   Après un brin de toilette et un rasage de la barbe en bonne et due forme, je jette la crème à raser et le rasoir après pour être encore plus léger ne comptant plus m'en servir jusqu'au retour en France. Ce matin, je profite d'être à mi-chemin pour changer les embouts des bâtons de marche complètement usés (ne comptez pas plus de 200km avec une paire d'embouts). C'est finalement à 5h45 que je quitte le refuge.
   

   L'objectif aujourd'hui c'est d'aller jusqu'à Kōchi (高知市) où il y a un restaurant de la chaine akindo-sushiro et juste à côté, un grand Sento. Et ce soir, je suis censé dormir dans un mangakissa. Et vu que hier, j'ai fini pas trop tard, je dois rattraper le retard. C'est donc près de 44km que j'ai à faire aujourd'hui mais sur du plat mais la motivation est toujours là surtout avec les sushis qui  me motive encore plus et l'envie de se détendre dans un bon bain chaud après la nuit glaciale que j'ai eu (j'ai pas bien dormi à cause du vent).


       Petite surprise dès le début de la marche, je dois suivre une longue allée de cerisiers en fleur. Cela faisait un petit moment que je n'en avais pas vu autour. Shikoku ne semble pas être le meilleur endroit pour voir la floraison, en même temps, je ne suis pas venu pour ça à la base.

Cerisiers en fleur à Aki City (安芸市)
   Durant plus de 3h, je vais marcher sur une piste cyclable qui longe la mer. C'est sympa d'être au calme et de ne pas commencer la journée directement avec le bruit des voitures. En chemin, je vais croiser la pauvreté au Japon avec un "camp" de retraités sans le sou si je puis dire. Sous une route aérienne, des cabanes construites avec des matériaux récupérés ici et là, s'alignent pour former un petit quartier de miséreux. Seul lot de consolation pour ces habitants, ce "quartier" est juste devant l'entrée d'une jolie plage.

    Puis tard, je vais croiser un pèlerin chargé comme une mule avec un gros sac à dos, plus un deuxième sac et une tente accrochée au premier sac. Cela en plus du bâton de marche et du chapeau. Malgré ça, il avance à la même vitesse que moi mais contrairement à moi, il doit faire régulièrement des pauses vu l'effort fourni qui est bien plus important que moi. Encore un moment qui me conforte dans le choix de partir en mode "M.U.L" (Marche Ultra Léger).

Pèlerin en mode M.U.L.E.T (Marcheur Ultra Lourd Et Têtu)
   L'arrivée à Kōchi signe la fin de la piste cyclable et le retour de l'autoroute 55 avec son lot de voitures qui est beaucoup plus dense que sur les derniers jours. En plus, il fait très chaud et il n'y a rien de beau sur cette partie de la route. J'arrive finalement au temple 28 ( Dainichiji 大日寺) à 10h05 soit une moyenne de marche de presque 5km/h. Ouah, pas mal pour une personne ayant des problèmes d'ampoules et de crevasses. Je sens que mes jambes sont rodées maintenant. Que marcher ne les fatigue plus. Que seule la logistique du logement définira la distance que je vais parcourir chaque jour. N'ayant jamais marché autant, je pensais (et vous aussi je pense) que la fatigue serait présente durant l'intégralité du pèlerinage mais en fait non. Le plus dur est sûrement le premier quart, après ça roule tout seul.

   Kōchi étant une grande ville (LA grande ville du sud de l'île), elle dispose de 6 temples sur les 88. Conséquence, je revois plein de pèlerins marcheurs comme à Tokushima en plus des bus de retraités. Ici, je sens que je suis un peu à part sûrement car les étrangers (pèlerin ou pas) sont plus rares que dans le nord de l'île. Alors être un étranger pèlerin, c'est encore plus surprenant. Le contact semble bien plus facile.

   Sur la route pour le temple 29, après un osettai (bonbon), un pèlerin marcheur (parti depuis Tokushima) vient à ma rencontre pour faire un bout de chemin. Il s'appelle Kiyoshi, à 68 ans et habite Osaka. C'est la première fois qu'il fait le pèlerinage. Pas de but précis, c'est juste pour le plaisir de l'effort et de visiter son pays (comme moi quoi). D'ailleurs, il ne s'embête pas avec la tenue. Il a juste la veste (dans son sac) et le livre à calligraphie. Point de bâton, de chapeau et autres objets inutiles. Son objectif : finir la deuxième partie du pèlerinage soit jusqu'à Sukumo. Vu mon faible niveau d'anglais et de japonais et lui, sont faible niveau de français (il est déjà venu à Bordeaux), les discutions sont un peu limitées mais avec les trois langues plus celle des signes, nous arrivons quand même à échanger des choses (grâce à lui, j'apprendrais à bien dire l'heure => avec une bonne prononciation). 

   La marche avec Kiyoshi n'a pas que du bon. Malgré son âge, il marche vite, très vite. Je dois forcer ma marche pour le suivre ce qui aggrave les blessures de mes pieds. Une fois arrivé au temple 29 (土佐国分寺 ) à 12h45, je profite que ce soit l'heure du repas pour faire une pause et laisser Kiyoshi continuer seul. Pour cela, je traverse un champs de rizières pour rejoindre un endroit tranquille mais en chemin, je me retrouve avec le pied droit dans l'eau en voulant éviter un tracteur. Et zut. Heureusement, il fait tellement chaud que la chaussure a le temps de sécher pendant le pique-nique.

Chemin entre le temple 29 et le 30.
   Petit manque de motivation après le repas. La route pour le temple 30 est très très moche. Rajoutez à cela que j'ai très mal aux pieds et que le ciel devient menaçant, vous avez le combo pour une après-midi de merde. A 15 h, après le temple 30 ( 竹林寺 ) , qui en passant est sans intérêt, je sens les premières gouttes de pluie. Et encore zut. Moi qui espérais y échapper, me voila à boiter sous la pluie en direction du Sento. Le détour de 800m de Google map me semble faire des kilomètres, il faut vraiment être motivé par un bain chaud et des sushis pour le faire dans mon état. Mais que de bonheur une fois arrivé. Vu que j'ai le temps, j’essaie de rester le plus longtemps dans le bain. C'est le moment du pèlerinage où mes pieds ne me font pas mal (car même durant la nuit, ils me lancent des piques de douleurs). A 17h20, je quitte l'endroit pour manger des sushis dans le restaurant à moins de 100 mètres. Même si les sushis ne sont pas aussi bons que dans les restaurants indépendants, c'est toujours agréable d'être assis à manger au calme, autre chose que des bento.

   A 18h00, je quitte le kaitenzushi pour aller au mangakissa qui se trouve à 3,5km. La pluie et le vent crient leur colère tandis que la nuit ainsi que la température tombent rapidement. Ne voulant pas attendre une hypothétique accalmie, il n'a pas fallu longtemps pour que j'ai le bas du corps trempé. Après 1h15 de marche entrecoupée de deux pauses, j'arrive au niveau de mon "hôtel". Je profite que le rez-de-chaussé soit un parking pour me changer et "étendre" les affaires mouillées. Sur internet, j'avais lu que ce mangakissa proposait un "forfait nuit" : 22h00 à 6h00 pour 1500yen. C'est d'ailleurs une des deux raisons qui ont fait que j'ai choisi celui ci (la deuxième raison étant que c'est près du temple 31 pour m'avancer demain). Étant en avance, je poirote en lisant le guide-map encore une fois. Je dis ça car à la force, je commence à assez bien le connaitre vu que c'est ma seule lecture du voyage. D'ailleurs, je vous conseille de prendre un livre si vous ne voulez pas vous ennuyer en fin d'après-midi.
   Un jeune client du mangakissa décide de partir et au moment d'enfourcher sa Mama Chari (vélo de ville à une seule vitesse qui couine le plus souvent) me voit et m'offre une petite serviette (encore dans son emballage) sans que cela soit un osettai, juste pour le plaisir de rendre service.

   Ayant un peu marre d'attendre (déjà 2h quand même) et ayant les chaussures presque sèches, je rentre quitte à payer une heure de plus plein tarif. Et là, je me confronte à la mentalité japonaise dans toute sa splendeur : cette incapacité à réfléchir par eux-mêmes quand la demande sort de leur process standard. J'ai demandé (en dessinant sur un papier) 45min plein tarif plus le pack nuit, soit au total 1815 yen. Il ont du se mettre à trois jeunes, plus internet, plus un logiciel de traduction vocal pour comprendre. Et cela à duré 25 min. Au final, le lendemain, je payerai 1650yen (on paie à la sortie).

Kilomètres journée : 44,67km
Kilomètres total : 351,30km



De Kōchi à Tosa City

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